Le droit du travail accessible à tout le monde

Deux ans après son lancement, quels résultats pour le projet “Code du travail numérique” ?

Aujourd’hui, seul un public expert maîtrise la complexité du droit du travail et de ses différentes sources (code du travail, conventions collectives, accords d’entreprises, etc.). Afin d’appréhender voire d’atténuer cette complexité réglementaire, un service public a été mis en ligne : le Code du travail numérique (CDTN).

Le CDTN fait partie des différents services numériques initiés par le ministère du Travail, de l’Emploi et de l’Insertion (MTEI) et portés par la fabrique numérique des ministères sociaux.

Le but est de faciliter les démarches et de fournir des services personnalisés aux employeurs et salariés du secteur privé pour qu’ils puissent comprendre et se retrouver parmi les articles du code du travail et les autres textes en droit du travail (notamment les conventions collectives et les accords de branche).

Deux ans après le lancement du projet, le site comptabilise plus de 10 320 487 visites dont 35 740 visites quotidiennes.

Le CDTN est constitué de différentes ressources liées au droit du travail et classées par thèmes (voir image ci-dessous). Il met également à disposition des outils comme des simulateurs.

Image Capture d’écran de la page “Thèmes” du CDTN. Les thèmes détaillés : embauche et contrat de travail, salaire et rémunération, temps de travail, congés et repos, emploi et formation professionnelle, santé, sécurité et conditions de travail, représentation du personnel et négociation collective, départ de l’entreprise, conflits au travail et contrôle de la réglementation

Chaque personne peut obtenir des réponses personnalisées (dans un langage accessible) sur ses droits, ses montants d’indemnités, ses durées de préavis, ou encore avoir accès à des modèles de courrier.

Le moteur de recherche s’appuie sur des mécanismes d'analyse sémantique qui permettent de traiter les questions des usagers exprimées en langage naturel et de les rapprocher des expressions juridiques associées. Le site permet également de trouver le service de renseignements en droit du travail de son département et, le cas échéant, de lui poser des questions ou de prendre rendez-vous selon les modalités de contacts prévues par celui-ci.

Afin d'améliorer et de mettre à jour le site en continu, deux méthodes sont utilisées.

Dans un premier temps, une veille juridique est mise en place pour repérer et intégrer au site toutes les nouvelles législations liées au travail. D’ailleurs, les prochaines étapes du projet prévoient l’intégration des prochains décrets portant sur la loi santé au travail.

En second lieu, une attention particulière est accordée aux retours utilisateurs afin de connaître leurs besoins pour les prendre en compte dans l’évolution du site. Sur chacune des fiches-articles correspondant à un droit ou une loi, se trouve une question en bas de page pour évaluer la satisfaction des usagers. Ces questions ont reçu plus de 78 043 réponses et ont permis de faciliter l’utilisation du site.

Image Capture d’écran du bouton “Avez-vous trouvé la réponse à votre question” qui se trouve à la fin des fiches du CDTN pour obtenir le retour des utilisateurs.

Des “trackers” sont ensuite utilisés par des data scientists pour comprendre la manière dont les utilisateurs consultent les pages.

Par exemple, dans les premiers temps du lancement de l’outil de recherche des conventions collectives, les trackers ont permis d’identifier que les utilisateurs n’allaient pas au bout de leur recherche. L’équipe s’est alors penchée sur la question en faisant des tests utilisateurs. La recherche des conventions collectives a été simplifiée et l’outil est désormais utilisé.

En plus de fluidifier l’utilisation du site, les statistiques de consultation permettent d’informer le travail des politiques publiques.

“Les recherches que les gens font sont une fenêtre ouverte sur la réalité.”

Les besoins recueillis vont servir aux politiques publiques dans la mise en place de solutions réelles et adaptées aux citoyens. Comme le rappelle, Catherine Lissarrague, cheffe de la mission coordination des systèmes d’information à la direction du numérique des ministères sociaux : « les recherches que font les gens sont une fenêtre ouverte sur ce qui se passe dans la réalité ».

Par exemple, la direction générale du travail (DGT) a proposé à l’équipe du CDTN de sortir un article et un modèle sur l’indemnité inflation à partir des besoins collectés. La mise en ligne de ce modèle a reçu un grand succès sur le site du CDTN selon les statistiques, ce qui a confirmé le besoin perçu par les agents métiers de la DGT.

Point vocabulaire : les méthodes agiles sont différentes techniques de gestion de projet destinées à faciliter la réalisations de projets en les décomposant en une série de petits objectifs atteignables. Elles permettent d’adapter les développements d’un produit numérique en fonction des retours des utilisateurs et des changements de contexte.

C’est justement grâce à ces méthodes que l’équipe du CDTN a pu s’adapter à des circonstances incertaines.

«On a traversé la crise sanitaire assez rapidement après le lancement du produit. On s’est aperçus que ce mode de souplesse permettait une meilleure réactivité et on a très rapidement pu répondre à la demande et créer des dossiers en lien avec la crise et les attentes des usagers. Par exemple, notre premier pic de visites était au tout début de la crise : on avait pris l’initiative de créer un modèle de garde d’enfants et il a été très diffusé car on était les seuls à l’avoir proposé. », confie Catherine Lissarrague.

“On ne perd pas d’utilisateurs, on multiplie les canaux”

L’équipe du CDTN mène une démarche de mutualisation, c’est-à-dire de rendre les outils qu’il développe réutilisables par d’autres plateformes de l’administration. Pour ce faire, elle a “widgétisé” ses différentes briques : le moteur de recherche, les simulateurs... sont facilement implémentables dans d’autres sites. L’objectif : toucher un maximum de personnes sans qu’elles aient nécessairement besoin de passer par le site du CDTN.

En effet, 80% des utilisateurs du CDTN y arrivent après avoir fait une recherche sur leur situation dans un moteur de recherche. Catherine Lissarrague explique que ces recherches peuvent mener les utilisateurs sur d’autres sites, plus centrés sur leur situation personnelle :* \*“par exemple, pour le préavis de retraite : beaucoup d’autres sites [de l’administration] traitent de la retraite, mais n’intègrent pas le calcul du préavis. On a donc widgetisé notre outil de calcul du préavis\”.** **L’équipe a ensuite travaillé avec le secrétariat d’Etat chargé des retraites pour nouer des partenariats.

Autre exemple : suite au changement de la convention collective des assistantes maternelles le 1er janvier 2022, le site du Chèque emploi service universel (géré par l’URSSAF) a référencé les fiches pratiques rédigées par le Code du travail numérique. Les personnes plus habituées à vérifier le site du CESU peuvent donc bénéficier de l’information créée par le CDTN.

Cette stratégie de mutualisation est bénéfique pour le CDTN, car elle lui permet d’illustrer son importance : des statistiques de visites sont collectées sur les widgets et permettent de justifier de l’utilité des outils et ressources développés. Catherine Lissarrague résume : « on ne perd pas d’utilisateurs, on multiplie les canaux ».

Dans l’optique d’une amélioration continue du CDTN, plusieurs évolutions du service sont prévues.

Premièrement, une réflexion est menée pour obtenir des retours utilisateurs encore plus précis et représentatifs : pour l’instant, l’équipe n’a pas pu recourir à des “panels d’utilisateurs”.

Deuxièmement, les contenus du site continuent à être enrichis au fur et à mesure de l’activité juridique et des besoins des usagers. Par exemple, un travail est en cours pour mettre en place un dossier détaillant chacune des procédures de licenciement.

Enfin la création de plusieurs partenariats avec d’autres services publics est envisagée pour étendre la visibilité du CDTN. Cela permettra à un maximum de salariés et d’employeurs de prendre conscience de l’ensemble de leurs droits et devoirs.

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